L'équipe GAME s'intéresse aux mécanismes de plasticité génomique en lien avec : (1) - l'évolution des espèces à un mode de vie parasite ou pathogène et (2) - l'adaptation contemporaine des ces mêmes espèces à des changements environnementaux, y compris aux méthodes de luttes déployées contre elles. Pour ce faire, les scientifiques de l'équipe utilisent des approches de bioinformatique, de biostatistique et d'intelligence artificielle.
GAME: Genomics & Adaptive Molecular Evolution
La plasticité et la stabilité de l'information génétique codée dans les génomes est au cœur de l'évolution, de l'adaptabilité et du succès écologique des espèces. Au sein de l'équipe GAME, nous étudions les mécanismes qui contribuent à la plasticité du génome en lien avec l'évolution adaptative des espèces dont les interactions impactent la santé des plantes.
Avec la démocratisation des techniques de séquençage et les progrès technologiques dans ce domaine, une masse d'informations multi-omiques (génomique, transcriptomique, épigénomique, métagénomique) croissante devient disponible pour une diversité d'espèces dont la biologie est liée à la santé des plantes.
Principales questions
Quelles sont les signatures génomiques de l'évolution adaptative vers un mode de vie parasite ou pathogène ?
Au cours de l'évolution, la capacité à parasiter ou à manipuler des hôtes a émergé de multiples fois de manière indépendante que ce soit entre de grands embranchements (arthropodes, nématodes, champignons, oomycètes) ou à l'intérieur d'un même embranchement. A plusieurs reprises, cela a concerné des espèces dont la biologie impacte directement négativement (parasites et pathogènes) ou indirectement positivement (agents de biocontrôle) la santé des plantes. Les données omiques couvrent désormais des espèces de différents modes de vie dont des parasites et des non-parasites ainsi que des pathogènes et des non-pathogènes. Cela constitue une riche ressource pour réaliser des analyses de génomique comparative permettant d'identifier des singularités communes à différentes espèces ayant évolué de manière convergente vers un même mode de vie. Ainsi des signatures d'évolution convergente ou parallèle vers un mode de vie parasitaire ou pathogène peuvent être identifiées. Ce type de travaux nous renseigne sur les évolutions et innovations génomiques essentielles à l'adaptation à ces modes de vie. Les évolutions dont on parle ici ont probablement eu lieu à des échelles géologiques.
Perspectives appliquées
Identification d’innovations génétiques ou de singularités génomiques communes à différentes espèces ayant évolué vers un mode de vie parasitaire ou pathogène. Ces gènes spécifiques jouent probablement des rôles clés et centraux dans la capacité des espèces à parasiter ou manipuler leurs hôtes. Cibler ces gènes via des approches d'écologie inverse pourrait permettre de perturber les fonctions associées et ainsi contribuer au développement de nouvelles méthodes de lutte contre les ravageurs de cultures.
Quels mécanismes de plasticité génomique contribuent à l'adaptabilité récente et contemporaine de ces espèces ?
A des échelles plus contemporaines, comment ces mêmes espèces de pathogènes et parasites évoluent et s'adaptent à des changements environnementaux voire aux méthodes de lutte déployées contre certaines d'entre elles? La disponibilité de données omiques pour différentes populations au sein d'une même espèce nous permet désormais d'explorer la plasticité et la variabilité du génome à des échelles de temps plus courtes. La comparaison de données omiques en provenance de différentes populations avec un génome de référence de la même espèce permet d'identifier les mutations ponctuelles et variations structurales dans ces génomes. Ces mêmes données permettent également d'identifier les gènes sous pression de sélection diversifiante probablement en lien avec des adaptations récentes vs. ceux sous pression de sélection purifiante. De même, cela ouvre la voie à l'identification de gènes cœurs indispensables et universellement conservés entre les différentes populations vs. des gènes "dispensables" dont la présence / absence varie en fonction des populations et éventuellement de leurs traits biologiques ou écologiques.
Perspectives appliquées
Identification de gènes clés impliqués dans l'adaptation des parasites et pathogènes à de nouveaux hôtes ou environnement ainsi que dans la résistance aux méthodes de luttes éventuellement déployées contre elles. Ici encore, des approches d'écologie inverse ciblant ces gènes et leurs fonctions pourraient aider au développement de nouvelles méthodes de lutte contre les ravageurs de cultures ou permettre d'optimiser les chances de succès des agents de biocontrôle.
Principaux modèles d'études
L'équipe GAME s'intéresse principalement aux génomes de parasites et pathogènes qui influent négativement sur la santé des végétaux ainsi que ceux d'agents de biocontrôle déployés contre les insectes ravageurs de cultures. Ce sont bien évidemment les modèles étudiés à l'Institut Sophia Agrobiotech qui sont au centre de nos analyses génomiques.
Parasites et pathogènes de plantes:
Nématodes parasites de plantes
Avec les arthropodes, les nématodes sont les animaux les plus abondants et diversifiés sur notre planète. Ces vers, pour la plupart inférieurs à 1 mm, se rencontrent dans quasiment tous les milieux sur terre. Chez les nématodes, la capacité à parasiter les plantes a émergé au moins quatre fois de manière indépendante au cours de l'évolution. Environ une centaine de génomes de nématodes sont disponibles publiquement, dont une quinzaine sont des parasites de plantes. Présentant des modes de parasitisme variés incluant des espèces ecto vs. endo-parasites ainsi que des espèces sédentaires vs. migratrices, ce phylum constitue un parfait modèle pour étudier les signatures génomiques de l'adaptation au parasitisme des plantes. Nos recherches dans ce domaine sont menées en coordination avec l'équipe IPN et des partenaires internationaux.
Oomycètes phytopathogènes
Les oomycètes sont des organismes eucaryotes filamenteux phylogénétiquement distants des champignons, des plantes ou des animaux. Ils appartiennent au clade des Stramenopiles qui contient également les algues brunes. Dans la phylogénie de ces organismes, le mode de vie phytopathogène a émergé plusieurs fois indépendamment au cours de l'évolution. Des génomes sont publiquement disponibles pour près de 100 espèces dont une dizaine de phytopathogènes. Là encore ces adaptations multiples et indépendantes ouvrent la possibilité d'identifier des signatures de l'adaptation à un mode de vie phytopathogène. Nos recherches dans ce domaine sont menées en coordination avec l'équipe IPO.
Arthropodes phytophages
Les arthropodes constituent l'un des si ce n'est le phylum avec le plus grand succès évolutif et écologique dans le monde animal. Des données génomiques sont disponibles pour des centaines et bientôt des milliers d'espèces y compris pour de multiples espèces phytophages ou parasites de plantes représentant des évolutions multiples et indépendantes de ce mode de vie. Ce phylum riche en génomes de haute qualité et pour lequel nous disposons d'une phylogénie datée ouvre la voie à des analyses comparatives associées à une horloge moléculaire à même d’identifier des expansions / réductions significatives de familles de gènes en lien avec l'adaptation à différents modes de vie. Sur ces modèles, nos recherches seront menées en coordination avec des partenaires internationaux ainsi que les équipes ID, M2P2 et BPI.
Agents de biocontrôle:
Guêpes parasitoïdes du genre Trichogramma
Les guêpes miniatures du genre Trichogramma, généralement d'une taille < 1 mm sont des parasitoïdes oophages. C'est-à-dire que les larves de ces guêpes se développent à l'intérieur d’œufs d'insectes hôtes à leur dépens. Grâce à cette faculté, différentes espèces de trichogrammes sont utilisées en lutte biologique pour contrôler les populations d'espèces d'insectes ravageurs de cultures. Des données génomiques sont disponibles pour seulement moins de 10 espèces sur les 200 connues dans ce genre. Cependant, grâce à la collection d'espèces de trichogrammes EP-Coll, située dans notre unité, nous avons accès à une ressource unique pour le séquençage de nouveaux génomes. De plus, les équipes RDLB et M2P2 générent de riches données de caractérisation biologique et phénotypique pour lesquelles des mises en relation avec la plasticité du génome seront fort intéressantes.
Originalité de l'équipe
En s'intéressant à différents modèles d'espèces, y compris dans des embranchements phylogénétiquement très éloignés, et en intégrant des données multi-omiques, l'équipe GAME a l'ambition d'obtenir une vision intégrative des mécanismes de plasticité génomique liés à l'évolution adaptative des parasites et pathogènes et ainsi faire avancer significativement les connaissances dans ce domaine.
Par ailleurs, en prenant en compte le pool de gènes présent dans l'environnement naturel de ces espèces, nous souhaitons étendre le concept d'holobionte à celui d'hologénome et ainsi en apprendre davantage sur les flux génétiques entre espèces dans un même environnement.